RagDoll_Annie
Nombre de messages : 184 Age : 49 Localisation : Longueuil Je suis : Maman de Ange(s) : Anthony
Deux pousières d'étoiles Décédé(e) à : 35 semaines de grossesse
9 et 12 semaines Le : 14 juin 2006
2005 et 2010 Date d'inscription : 03/12/2008
| Sujet: Histoire de mon ange Anthony (RagDoll_Annie) Lun 8 Déc - 20:09 | |
| De : RagDoll_Annie (Message d'origine) | Envoyé : 23/07/2006 08:51 | Aussi loin que je puisse me rappeler, j’ai toujours voulu avoir des enfants. Lorsque j’étais adolescente, ma mère avait une garderie en milieu familial et je l’aidais avec les enfants quand je revenais de l’école. Les années ont passées et je me suis retrouvée à 30 ans, célibataire, avec une horloge biologique qui me criait à tue-tête que je n’aurais pas toute la vie pour fonder une famille. Même si nous sommes dans les années 2000 et que plusieurs disent que le père n’a pas besoin d’être présent pour avoir un enfant, je voulais tout de même que mes enfants aient tous le même père, celui qui serait à la fois un père aimant et un amoureux, un ami et un amant pour la mère que je voulais être. J’avais presque abandonné l’idée de trouver un jour l’homme idéal quand j’ai rencontré Christian via Internet. Ça a tout de suite cliqué entre nous deux, et nous avions tous les deux le sentiment que nous avions finalement trouvé LA bonne personne.
Un an après le début de notre relation, nous avons tous les deux décidé de fonder une famille. À mon plus grand étonnement, je suis tombée enceinte dès que j’ai cessé de prendre la pilule, je n’en revenais pas, j’ai même passé trois tests de grossesse pour être bien certaine! Nous étions tous les eux très heureux puisque nous voulions tous les deux avoir des enfants depuis plusieurs années, mais attention l’arrivée de la bonne personne dans nos vies. Nous avons attendu quelques jours pour annoncer la nouvelle à nos familles respectives, tous étaient fous de joie en apprenant la nouvelle.
La grossesse est vraiment une étape formidable dans la vie d’une femme, mis à part certains désagréments, tels que les nausées. Mon entourage me disait ne me pas m’en faire, ça n’allait durer que 3 mois et après tout irait mieux. Premier mythe qui a été démoli : mes nausées ont durées 5 mois ½! J’étais accablée d’un besoin pressant de manger à la minute près sinon j’allais être malade. À mon grand désarroi, les seuls aliments qui passaient bien étaient les fruits, en hiver ce sont des items quasiment hors de prix, surtout lorsque vous avez envie de manger des framboises ou des fraises! Avec l’arrivée du printemps, tout cela est disparu et je commençais enfin à sentir mon petit bonhomme bouger! Au fils des échographies, nous faisions connaissance avec Anthony qui avait de l’énergie à revendre! La grossesse se déroulait à merveille, je ne faisais pas de diabètes de grossesse, ma pression était parfaite, une prise de poids normale, le bébé se développait harmonieusement.
Le mois de juin arriva finalement, au lendemain de mon 32e anniversaire de naissance, je disais au revoir à mes collègues de travail pour un an, pour mon nouvel emploi de maman à temps plein pour une première fois. Mon conjoint et moi allions pouvoir terminer la chambre d’Anthony car nous avions le sentiment qu’il se montrerait la binette avant la date prévue d’accouchement fixée au 17 juillet 2006. Ce sentiment avait été renforcé par la dernière échographie nous montrant Anthony en pleine forme, mais la tête déjà placée vers le bas.
Les fortes chaleurs de la fin mai et du début juin avaient fait en sorte que ma pression était plus élevée et que mes pieds étaient terriblement enflés. Craignant que ce soit un signe de prééclampsie, j’ai contacté Info-Santé, parler de la situation avec l’infirmière donnant les cours pré-nataux et aviser mon obstétricien de la situation. Pour tous ces spécialistes de la santé, la situation n’était pas alarmante voire même normale étant donné la canicule. Rassurés par ces propos, mon conjoint et moi avons rassemblé toutes les choses d’Anthony et les cadeaux reçus lors du shower de bébé dans notre salon, le temps que la chambre enfin soit terminée.
Le 12 juin 2006, je me suis levée et ai constaté un écoulement de couleur et texture étranges. Croyant que ça pourrait être le bouchon muqueux, mais voulant me le faire confirmer, j’ai téléphoné au centre de santé où je devais accoucher. Ces derniers m’ont alors confirmé qu’étant donné que j’étais à la 35e semaine de ma grossesse, c’était probablement cela et de demeurer alerte si jamais je perdais mes eaux et que je devrais aller les voir directement si tel était le cas. J’ai donc décidé de prendre la journée plutôt relax, faisant des siestes et j’ai terminé de faire mon sac pour un éventuel départ à l’hôpital. Les pertes se sont estompées au cours de la journée, j’en ai donc conclu que les spécialistes avaient eu raison et que mes inquiétudes quant à la couleur étaient probablement reliées au fait que c’était ma première grossesse.
À 1h du matin, je me suis réveillée en même temps que mon conjoint qui devait aller travailler et j’ai senti quelque chose couler entre mes cuisses, je me suis précipité à la toilette. Encore cette substance étrange, même couleur et même texture. Un peu paniquée, j’ai contacté Info-Santé CLSC puisque je me disais que le bouchon muqueux ne pouvait pas s’écouler sur une si longue période. C’est alors que mes doutes furent confirmés par l’infirmière en ligne. Selon la couleur que je lui décrivais, il y aurait peut-être du méconium . Prise de panique, j’ai appelé à l’hôpital pour les prévenir de notre arrivée.
Une fois à l’hôpital, j’ai été installée dans une chambre à l’unité des naissances et une infirmière est venue pour vérifier le cœur d’Anthony avec le petit appareil prévu à cet effet… rien. Elle me dit ne pas m’inquiéter, quand le bébé est en position, il arrive qu’ils aient de la difficulté à entendre le cœur. Quelques minutes plus tard, une seconde infirmière tente d’entendre le cœur, même résultat. On me dit ne pas m’en faire, que le médecin allait venir vérifier le tout avec une échographie. Je suis prise de panique, et les pires pensées rôdaient dans ma tête. Le médecin est arrivé plus tard, et en voyant Anthony sur l’écran, j’ai pu constater avant même qu’elle ne le dise, que son petit cœur ne battait plus. Quand elle m’a confirmé le tout, j’étais incapable de réagir, comme si mon cœur et mon cerveau avaient soudainement arrêtés de fonctionner. J’ai éclaté en sanglots uniquement lorsque mon conjoint a été à côté de moi. Comment cela pouvait-il nous arriver? La grossesse avait été tout à fait normale, avais-je fais quelque chose de dangereux sans le savoir et avait accidentellement tué mon fils? Aurais-je pu le sauver si j’étais allée à l’hôpital le matin même lors du début des pertes? Cette seule pensée m’horrifiait au plus haut point. Comment annoncer la nouvelle à mes parents qui étaient juste à côté et nous avaient accompagné à l’hôpital?
Après quelques temps, le médecin et les infirmières sont revenus nous voir et ont tous tenté, tant bien que mal, de répondre à nos questions. C’est alors que j’ai appris qu’il était « fréquent » que des grossesses soient interrompues sans raison au dernier trimestre vers la 34e semaine. Le personnel nous a dit de ne pas nous culpabilisé, nous n’avions rien fait de mal, la grossesse et le développement était normal. Ils allaient devoir faire une autopsie pour découvrir une possible cause, et encore, il y avait beaucoup de chance que la cause demeure un mystère.
Ensuite sont venus les propos que nous redoutions : le déroulement des heures à venir, explications du déroulement de l’accouchement, on m’assurait qu’on ne me laisserait pas souffrir, que j’aurais droit à l’épidurale au moment venu. Quoi? J’allais devoir accoucher naturellement? Non, pas question, je veux une césarienne, je ne pourrais jamais trouver la force de pousser. Psychologiquement, c’était trop difficile à envisager pour moi. Malheureusement pour moi (et heureusement quand j’y repense), on m’a dit que pour s’assurer que mes futures grossesse se déroulent bien lors de l’accouchement, je devais accoucher naturellement. Je ne redoutais plus la douleur physique, c’était l’idée de donner la mort et non la vie qui me terrifiait. J’ai cru pendant 8 mois qu’Anthony sortirait de moi, pleurerait, serait mis sur moi et que 24h plus tard notre nouvelle petite famille reviendrait à la maison. Je ne pouvais pas envisager qu’il ne bougerait pas à sa sortie, et pire, à quoi allait-il ressembler? Depuis combien de temps était-il décédé?
Le matin suivant cette horrible nuit, mon obstétricien est venu nous voir à la première heure et nous a expliqué ce qui se passerait dans les prochaines 24 heures. On allait devoir m’administrer un médicament par voie vaginale pour dilater le col de l’utérus et provoquer les contractions. Une fois le col effacé nous allions pouvoir procéder à l’accouchement. J’ai tenté une dernière fois d’obtenir une césarienne, en vain. Tout au cours de la journée, nous avons dû raconter comment nous nous sentions aux nombreuses infirmières qui s’occupaient de moi, à une psychologue et à une responsable de la pastorale. À force de raconter le tout, mon conjoint et moi devenions zombis, presque immuniser contre la situation, la racontant comme une histoire, ne réalisions plus que ça nous arrivait réellement à nous. Ce qui nous réconforta, c’est que même si ce n’était pas la première fois qu’ils vivaient cette situation, notre histoire semblait toucher tout le personnel qui pleurait avec nous.
Le matin du 14 juin, dès mon réveil, on m’a amenée à la salle d’accouchement. Une fois sur place, on m’a installé les solutés, fait une épidurale puis, le personnel a attendu que le tout fasse effet. Malheureusement pour moi, la péridurale n’a pas fait totalement effet puisque je sentais les contractions qui étaient très douloureuses. Vers 16h, j’étais enfin prête à commencer à pousser. À 17h05 est né mon magnifique petit Anthony pesant 5lbs tout juste. Aussitôt le cordon coupé par mon conjoint, et Anthony un peu nettoyé, on l’a remis à mon conjoint le temps que le placenta soit expulsé et que le médecin vérifie si je devais avoir des points de suture. Une fois tout cela terminé, mon conjoint m’a remis Anthony dans les bras. Il était tellement beau, tellement parfait! Je l’ai tenu dans mes bras dans la salle d’accouchement durant plus d’une heure. Nous avons eu le temps de tout vérifier au sujet d’Anthony, et tout semblait parfait, aucune malformation apparente, aucun retard de croissance quelconque. Il ressemblait beaucoup à mon conjoint !
En soirée, j’ai également demandé d’avoir Anthony de nouveau avec moi. J’avais besoin d’avoir mon fils avec moi, de le sentir, de lui parler, de le bercer et de lui chanter des chansons avant de m’endormir. Je ne l’ai gardé que 30 minutes avec moi, étant trop épuisée par l’accouchement. J’aurais voulu le garder la nuit entière, qu’il soit à côté de moi toute la nuit!
Le 15 juin, mon obstétricien est venu me voir suite à l’accouchement et m’a fait part d’un détail inquiétant. Suite au passage du test de glucose, il s’est avéré que mon taux de sucre était légèrement plus élevé que la normale et qu’on aurait dû me contacter pour passer un second test, ce qui n’avait pas été fait. Il était fort probable qu’il s’agissait d’un « faux positif », et que je n’avais peut-être pas fait de diabètes gestationnel. Il m’avisait de cela parce qu’il venait de recevoir les résultats, la feuille n’avait pas été placée dans mon dossier, donc il n’avait lui-même pas été au courant de la situation avant ce matin là. Est-ce que cela avait un lien avec le décès de mon petit Anthony? Il ne le savait pas, seule l’autopsie pourrait le dire. Peu de temps après, mon conjoint est revenu de la maison avec ses parents pour la cérémonie religieuse tenant lieu de baptême pour notre petit Anthony. Mes parents ne se sentaient pas capable d’être présents pour cette cérémonie. Une fois la cérémonie terminée, nous avons pris quelques photos avec notre caméra numérique afin de conserver la plus de souvenir possible d’Anthony. Mon conjoint l’a également bercé durant plusieurs minutes, voulant avoir quelques temps seul avec son fils.
La sortie de l’hôpital et le retour à la maison furent très difficile. J’étais partie de la maison enceinte avec un bébé dans mon ventre et j’y revenais le ventre vide, mais sans bébé avec moi. La chambre d’Anthony n’était pas encore terminée et toutes les choses de bébé étaient dans le salon. Il nous a fallu presque un mois pour terminer la chambre et mettre les choses d’Anthony dans des bacs et entreposer le tout dans le garde-robe de sa chambre.
Il aura fallu presque un mois aussi pour que ma mère réussisse à regarder les photos d’Anthony. Pour ce qui est de mon père, il sait qu’ils ont une copie de l’album photos, mais je ne sais pas s’il est à ce jour capable de regarder les photos.
Maintenant mon conjoint et moi vivons dans l’attente des résultats de l’autopsie d’Anthony. Je dois avouer que je suis très nerveuse face à cela. D’un côté je souhaite que les causes du décès d’Anthony demeurent inconnues, de cette façon, ce ne sera pas la faute de personne s’il est décédé. D’un autre côté, je me dis que si les médecins trouvent une cause médicale, je serai bien encadrée lors de mes prochaines grossesses afin d’éviter qu’une telle catastrophe se reproduise. Ce que je souhaite le plus au monde, c’est que si une cause de décès peut être déterminée, que ce ne soit pas à cause d’un diabète gestationnel mal géré car pour nous, ceci voudrait dire que quelqu’un, quelque part, à cause d’une inattention, est responsable du décès de mon fils. Je sais que je ne devrais pas le voir ainsi, mais je ne peux faire autrement pour l’instant.
Il arrive souvent depuis mon retour à la maison de sentir l’odeur d’Anthony. Je le sens sur un toutou avec lequel je dors (eh oui, à 32 ans), sur mon oreiller, sur une photo de lui, sur mes mains. Ça me rassure car je sens qu’il est là près de nous et ne nous a pas totalement quitté.
Dors bien Anthony mon petit ange, maman et papa t’aiment très fort et pensent tout le temps à toi.
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