Cela fait presque deux mois que son coeur s'est arrêté, sans raison...
Ce soir j'ai envie de raconter mon histoire, dans l'espoir que ça me fasse un peu de bien...
Mes trois enfants sont nés en avril.
Ma fille, Elise, est née en 2003, après une grossesse "normale", sans soucis, un accouchement rapide, sans soucis non plus. Mais à peine quelques heures après sa naissance je commence à m'inquiéter. Elle ne pleure pas, ne mange pas, elle est trop calme, hypotonique. les médecins aussi se posent des questions. Je reste à la maternité une semaine, je la nourris millilitre par millilitre à la seringue mais elle perd trop de poids et elle est toujours trop calme. Alors elle est hospitalisée en néonat pendant plusieurs semaines. Les médecins lui trouve un ulcère à l'estomac, et lui mettent en place un traitement. mais ils cherchent autres choses, sans trop savoir quoi. On lui fait des dizaines et des dizaines d'examens. On finit par arriver chez la généticienne je ne sais plus trop comment. Elise grandit trop vite, elle a des difficultés dans ses acquisitions. Après deux ans de recherches le diagnostic tombe: c'est une maladie génétique, le syndrome de Sotos. Pas de traitement. Beaucoup d'incertitudes pour son avenir. L'angoisse... Elise est prise en charge dans un centre deux fois par semaine. on la stimule énormement. Mais on vit avec cette épée de Damoclès au dessus de la tête.
Aujourd'hui Elise va plutôt bien, elle suit une scolarité normale et n'a plus que des "soucis" physiques.
Nous ne sommes pas porteur de l'anomalie génétique. Nous décidons donc d'avoir un deuxième enfant.
Maé se fait attendre pendant deux ans, mais il arrive enfin. La grossesse est fatiguante, l'accouchement douloureux mais il va bien. Il souffre d'un torticolis congénital sévère mais ce n'est pas grave... Mais à l'âge de trois mois, au cours d'une visite classique à la pmi, c'est de nouveau l'angoisse. La pédiatre nous envoie en urgence faire un scanner cérébral. Et là le diagnostic tombe tout de suite: hydrocéphalie. Incertitude encore quant à son développement. Il n'y a rien à faire, juste à surveiller. Surveiller l'évolution de ses acquisitions psychomotrices. Surveiller qu'il ne se cogne pas. Il risque l'hémorragie cérébral. Aujoud'hui il a treize mois et il semble aller bien. Nous voyons le neurologue dans quelques jours...
Mais nous rêvons tous les deux d'une famille nombreuse. Alors après la naissance de notre deuxième enfant, on se dit qu'on va laisser faire la nature et on espère alors ne pas avoir à attendre trop longtemps. La "chance" nous sourit puisque je tombe enceinte tout de suite. La naissance est prévue pour juin 2010. Cette fois je me dis qu'il ne peut rien nous arriver, je suis super bien suivie du fait de mes antécédents, à la matenité une fois par mois, et à domicile deux fois par mois. J'ai aussi une écho chaque mois. je suis sereine, ma grossesse se passe très bien, je suis juste un peu fatiguée, mais c'est normale puisque mon petit Maé ne fait toujours pas ses nuits! Nous sommes super contents, c'est un garçon. Nos fils auront treize mois d'écart, ils partageront leur chambre, leurs jouets, leurs vêtements... On attend notre petit Noé avec impatience. On est sur un petit nuage. Il fait déjà parti de la famille, on parle de lui tout le temps, je le sens bouger tous les jours... Tous les jours jusqu'à ce "maudit" jour.
Ce jour là, c'est le premier anniversaire de Maé... Mais je ne sens pas Noé bouger... Alors direction les urgences. J'ai un mauvais pressentiment, je ne sais pas pourquoi mais je pense à la mort foetale in utéro, je me dis que ça n'arrive malheureusement pas qu'aux autres, que ça pourrait aussi me toucher. Mais en même temps je me dis que j'ai déjà eu suffisamment de "malchance" dans ma vie, et que je m'inquiète certainement pour rien. Je préfère tout de même aller faire un monito, pour être "rassurée".
La sage femme m'installe et me pose le monito, elle ne trouve pas le coeur. Je comprends qu'il y a un problème. Elle va chercher l'appareil d'écho, pose la sonde, se ravise et me dit qu'elle va chercher le médecin qui s'y connait mieux. Je commence à avoir peur. Le médecin arrive et reste fixé sur l'écran pendant de longues minutes, l'air grave. Je comprends mais j'espère tant qu'il ne dit rien... "Je n'ai pas de bonnes nouvelles madame. Il n'y a plus d'activité cardiaque". Cette phrase résonne dans ma tête nuit et jour. Je voudrais revenir en arrière, je voudrais me réveiller de ce cauchemar... Tout se précipite alors. Il faut prévenir mon mari. La sage femme l'appelle et lui dire de venir tout de suite. Il comprend qu'il y a un problème mais il pense juste qu'il sera papa plus tôt que prévu... Je voulais lui annoncer moi même, et pas par téléphone. Il faut ensuite l'annoncer aux enfants et à ma belle-mère qui est avec eux dans la salle d'attente. Ma fille comprend, elle a tout juste 7 ans.
Je rentre à la maison, pour revenir à la maternité deux jours plus tard pour accoucher.
L'accouchement se déroule vite, très vite. mon petit Noé est là en moins de deux heures. Il est si beau. Il pèse deux kilos. Je le garde contre moi une bonne partie de l'après midi, je reviens le voir le soir, le lendemain, et pendant une semaine. Je suis tellement triste mais il est encore "avec moi". Je peux encore le toucher, le carresser, le sentir...
Dix jours après sa naissance, c'est l'incinération, la cérémonie... Et pour moi c'est un arrachement. Je ne peux alors plus le voir... je n'ai plus rien à faire de mes journées, je n'ai plus envie de rien. Je suis anéantie.
Nous avons eu les résultats de l'autopsie il y a quelques jours. Rien. Noé était en parfaite santé, et moi aussi. Aucune explication. Ca me rend encore plus malheureuse... Je n'ai rien à quoi me raccrocher... Je resterai toute ma vie avec mes questions, avec mes "si".
Et pour l'avenir, j'ai peur. Nous voulons d'autres enfants, mais que va-t-il se passer? Les deux premiers ont une maladie, le troisième est mort sans raison... Qu'adviendra-t-il du quatrième? J'ai tellement peur. Peur que la malchance s'abatte encore sur nous. Je n'arrive pas à comprendre que l'on puisse être touchés par des choses aussi rares à plusieurs reprises. Qu'ai-je donc fait pour "mériter" ça?
Voilà mon histoire...
Stéphanie
maman d'Elise, 7 ans, Maé, 13 mois, et Noé