Lili a été une enfant si désirée et s'est fait beaucoup attendre.
Quand on a su qu'elle était là en moi, nous avons tant souhaité qu'elle soit une fille. En effet, je suis porteuse du gène ATRX, un gène pouvant à 50% de risques transmettre un handicap sévère chez un garçon. Aussi, étant une fille, elle aurait 50 % de risques d'être porteuse du géne et non de développer la maladie.
Quelle fut notre soulagement et bonheur de savoir qu'on attendait une fille.
Lors de la 2ème échographie morphologique, l'inquiétude était visible sur le visage de mon gynécologue. L'examen a été long et silencieux. Un moment angoissant pour nous.
Le gynécologue nous a alors annoncé que Lili avait une grave malformation cardiaque confirmée par un cardiologue par la suite et également un faible poids pour son terme.
Celui ci nous a proposé une amnioscentèse que j'ai refusée suite à mes prédispositions à des fausses couches répétées et inexpliquées.
Alors, nous avions décidé de la garder et le cauchemar a commencé : Allait elle mourir in utéro ? A la naissance ? Quelques jours après ? Allait on pouvoir l'opérér ? Combien d'opérations ? Allait elle survivre à ces interventions ? Quelle serait la qualité de sa vie ? N'aurait elle pas une maladie génétique, donc d'éventuelles autres malformations ? Et encore d'autres interrogations ?
Ma grossesse ne fut plus qu'une période de vive angoisse et de tristesse. Et pourquoi avais je autant de contractions que le gynécologue n'expliquait pas autrement que d'un côté psychologique.
Le samedi 28 Août 2010 à 35 SA au réveil, j'ai perdu mes eaux et fus transportée à l'hôpital.
Lili n'était plus protégée et son coeur supportait mal les contractions. Alors, on nous a proposé soit de laisser l'accouchement naturel se produire et l'accompagner en l'évitant de souffrir (elle ne vivrait pas) soit de faire une césarienne en urgence et de mettre tout en oeuvre pour la sauver.
Je n'ai pas hésité et mon conjoint a respecté ma décision.
Elle est née par césarienne et conduite en réa néonatologie. Elle y a été entubée et a subi 3 échographies cardiaques.
Nous l'avons fait baptiser.
Diagnostic : sa malformation était opérable à Necker. Nous étions plein d'espoir.
Le 31 août 2010 au matin, elle a fait un arrêt cardiaque et on a pu la ranimer.
Les médecins nous ont parlé de probables lésions cérébrales après cet arrêt cardiaque. Puis, son état s'est aggravé. Plus aucun de ses organes vitaux ne fonctionnaient malgré toute médication et appareillage. Elle avait certainement aussi d'autres malformations mais le scanner n'avait pu être fait après son arrêt.
Elle est morte dans l'après midi dans nos bras.
Moins de 15 jours après, la généticienne nous a appris après prélevement du cordon ombilical que Lili était porteuse de la trisomie 13. Il s'agissait d'un accident, nos caryotipes étant normaux.
Cette trisomie est incompatible avec la vie. Elle n'aurait pas pu survivre.
On avait voulu une fille pour éviter qu'elle ait le syndrôme ATRX comme mon fils.
Et là, notre fille avait une trisomie 13. Nous avons eu de la malchance, nous disaient les medecins.
Sauf que moi, j'étais prête à tout faire pour Lili, j'étais prête à lui donner ma vie en échange de la sienne.
J'ai voulu et je lui ai donné toutes ses chances sans savoir qu'elle en avait aucune.
Je me suis tant accrochée à sa vie, à l'espoir de la voir vivre.
Je sais aujourd'hui qu'elle a souffert dans mon ventre, à sa naissance et pendant ses 3 jours de vie.
Si j'avais fait le choix de faire cet amnioscentèse, j'aurais certainement choisi d'abréger ses souffrances et de la laisser partir plus tôt.
Mais, les choses ont été ainsi.
J'ai agi ainsi parce que chez moi mon amour pour mes enfants est un amour puissant et hors du commun et mon désir d'avoir un enfant normal est aveugle. Or, on ne peut pas tout maîtriser dans la vie.
Je te demande pardon, Lili.
Je t'ai aimé, je t'aime et je t'aimerais toujours...
Je t'aime toi, Dorian, mon fils handicapé pour qui je me dévoue et me bats chaque jour de ma vie.