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 Le capitaine Pepito, Julian Plana

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zaaor

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Ange(s) : Julian le capitaine, mini amiral adjoint 1 et 2.
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MessageSujet: Le capitaine Pepito, Julian Plana   Le capitaine Pepito, Julian Plana Icon_minitimeMar 9 Déc - 14:20

Le lundi 27 août alors que je suis à 26 semaines de grossesse, je fais une hémorragie. J'appele l'hôpital qui me dit de me rendre d'urgence en ambulance.

Là commence le mauvais film de Hitchcock.

Au lieu de se rendre directement du point a au point B, l'ambulancier me fait faire la run de lait en faisant tout le grand tour de l'île par Gouin. Il nous perd même dans Charlemagne. Lorsque je vois passer la sculpture en honneur de Céline, je me dis que je devrais peut-être prendre moi-même le volant.

J'arrive à l'hôpital et je vois mon copain qui est là. Il est parti du centreville et est arrivé 25 minutes avant moi. Une chance que je n'étais pas en arrêt cardio-respiratoire.

Ma gynéco qui est sur place me diagnostique un important hématome placentaire. Je dois être transférée d'urgence à Ste-Justine qui bien sûr, n'a pas de place pour moi. J'échoue au Jewish Hospital.

À cet endroit ils m'examinent et le couperet tombe: je devrai être allongée pour les trois prochains mois. Misère! J'en deviens écarlate mais si c'est qu'il faut pour que Pepito vienne en santé (il a pas encore de nom) je le ferai.

Ma seconde préoccupation est: qu'est-ce qu'on mange lorsqu'on mange kascher? Je ne peux me lever que pour aller aux toilettes. La belle vie quoi!

Dans la nuit du 30 au 31, je me réveille en sueurs avec un mal de tête si imposant que j'en ai presque peur. Je n'ai jamais eu aussi mal, je me dis que ce n'est pas normal et appelle l'infirmière en onomatopant que je dois être en train de me péter un anévrisme ou un truc du genre. Ils prennent ma pression: presque 180 sur 125. Oups, là ça va pas bien. Ils me retranfèrent à l'unité des risques élevés et mon cauchemar commence alors qu'ils me branchent sous perfusion avec du sulfate de magnesium. Ce merveilleux cocktail s'utilise pour faire descendre la pression. Je suis diagnostiquée pré-éclampsique. Ils doivent faire tout ce qu'ils peuvent pour éviter que je ne franchisse le cap de l'éclampsie car je pourrais alors avoir des convulsions ou me péter une attaque. Ils me disent qu'ils doivent me mettre sur une sonde urinaire, (merci beaucoup). Mon cauchemar commence.(ou se poursuit). Le sulfate est un truc si fort que j'hallucine la bonne partie du temps. Je n'ai jamais pris de drogue mais j'imagine qu'un mauvais bad trip LSD doit ressembler à cela. J'ai l'impression d'avoir fait une incursion dans un monde où je n'appartiens pas et que l'on ne veut pas me laisser quitter.

Dans la nuit du 31 au 1er, ils décident de me provoquer car le danger est rendu trop élevé pour moi et pour le bébé. Ils me mettent une sonde de Foley (grosse comme une montgolfière) dans l'utérus et attendent qu'elle redescende. J'ai plutôt l'impression que c'est l'utérus au complet qui est en train de se désintégrer. Je ne peux manger tout le temps que je suis enchaînée à mon sulfate alors les heures passent et je me sens devenir de plus en plus faible.

Je suis branchée en permanence sur le pictocin pour provoquer des contractions mais l'effet du sulfate étant de bloquer les dites contractions je me trouve dans un no man's land sans fin. Rien ne se passe. Je ne dilate pas. Je demande une péridurale. Mon copain doit me tenir de tous les côtés tellement je suis faible et gelée par le sulfate. L'anesthésiste coince son cathéter entre deux os dans mon dos. Peu importe, nous ne sommes pas à un petit drame près, n'est-ce pas? Bien sûr que sa péridurale ne fonctionne pas.

Je dois préciser que le Jewish étant un hôpital universitaire, je ne vois que des résidents. Du JR au SR, de l'unilingue anglais à toutes les sauces, je ne vois jamais le même médecin. Ça m'inquiète. Je ne me sens pas en de bonnes mains.

Le matin du 2 septembre, je dis à mon copain du dernier souffle qui me reste: "Fais quelque chose, je t'en prie, je ne suis plus capable, je suis au bout de mon rouleau". Ça fait exactement 28 heures qu'ils essaient de provoquer mon accouchement. Il hausse le ton, demande à voir le médecin chef. Celui-ci se présente environ 2 heures plus tard et décide de me préparer pour une césarienne d'urgence. C'est le seul mini boost qui me permet de continuer. Nous attendons, nous attendons encore; il ne se passe rien.

Au changement de relève des médecins, sûrement que Joe Cool vient d'arriver avec son café et commence à se mettre le nez dans mon dossier sans vraiment savoir où on en est rendus. Il renverse la décision de la césarienne et ordonne de me remettre sur le pictocin. Je pleure toutes les larmes de mon corps. On me dit " seulement quelques heures, ça va fortifier le bébé." Je souffre tellement que le bébé, ils pourraient me le sortir par les deux trous de nez que ça ne pourrait être plus pénible. Je me dis que le bébé il l'a eue sa chance, ça fait presque 30 heures qu'il se fortifie. À trop vouloir tirer l'élastique, il risque de nous péter en plein visage.

Finalement quelques heures plus tard ( 32 heures de travail) ils se rendent compte que le bébé est en détresse respiratoire. Bravo, ça vous a pris huit ans d'étude pour comprendre qu'on en arriverait là?

Ils me préparent d'urgence et on retourne à la case départ. Dix minutes plus tard je suis allongée sur la table d'opération en essayant de marmonner que je sens tout ce qu'ils me font car l'anesthésie ne fonctionne pas. Comme Marc n'est pas encore à mes côtés parce qu'il doit revêtir son suit de Star Trek stérile, personne ne m'entend puisque le niveau décibels est quasiment nul. Il revient tout à coup lorsqu'ils se mettent à m'ouvrir la panse et que je sens le froid du scalpel sur ma peau. Je me mets à hurler; ils me mettent un truc sur la bouche pour m'endomir. Ok ciao!

Je dors paisiblement sans me rendre compte de ce qui se passe quand tout d'un coup, je n'ai plus d'air. Ça me réveille sans me réveiller puisque je suis sous anesthésie générale. J'essaie de trouver de l'air. Il n'y en a pas. Je vois comme un damier au plafond et essaie de trouver une parcelle d'oxygène dans tous les coins. Il n'y en a pas. Je me dis, merde c'est pas comme ça qu'on meurt au moins. Tout d'un coup, j'entends respire Karina, respire! Respire Karina respire. Je me sens revenir de loin, très loin. Je suis intubée. J'essaie de leur faire comprendre de m'enlever cette saleté car je suffoque. Ils ne comprennent pas. Je passerai alors sept longues heures aux soins intensifs/salle de réveil car je viens de subir un arrêt respiratoire. Toujours branchée sur mon foutu sulfate à la con. Le mélange s'est cependant amélioré car on l'a additionné maintenant de morphine. Et j'hallucine dix fois plus. Je ne suis pas capable de m'ouvrir les yeux. Je suis un blob. Une loque musculaire et je manque toujours d'air. La fiancée de Frankenstein avec cette incision sur le bas du ventre et ces agrafes qui doivent leur être vendues en prix de gros étant donné la quantité qu'ils utilisent.

On m'apprend ensuite que j'ai une anomalie qui fait que si on m'endort, je ne puis ensuite respirer par moi-même. Mon corps ne revient pas d'entre les morts. Il doit juste en avoir sa claque!

Mon copain arrive le soir avec trois photos de notre fils. Il est si fier et excité, il veut me le montrer. Je ne suis même pas capable de faire le focus avec un oeil pour regarder. Je ne vois que des taches de toutes les couleurs. Je me sens si mal de ne pas pouvoir voir mon garçon.

Ils me placent alors pendant deux longues journées dans un chambre presque noire où aucune stimulation ne m'est permise car elle pourrait me causer des convulsions ou une hémorragie cérébrale. Puis-je mentionner qu'on se trompe en me donnant un médicament pour la pression qui a comme conséquence de me provoquer encore une fois un affaissement respiratoire? " On s'excuse madame, on s'est trompé, nous n'aurions pas dû vous donner cela." Hitchcock devient soudainement léger en comparaison. Je suis dans Texas Chainsaw Massacre.

Ils finissent par m'enlever le sulfate le lundi soir mais me permette de garder ma sonde. Quel bonheur! "Habituellement madame, nous ne laissons la sonde que douze heures mais dans votre cas étant donné que ça fait cinq jours, nous vous annonçons que vous avez gagné la loto infection urinaire." Merci beaucoup!

Le mardi 4 septembre, après avoir découvert que je portais maintenant le beau qualificatif d'incontinente, je peux enfin, aller voir mon fils. Il pèse presque deux livres et a deux ou trois rosettes qui fait que son père ne peut le renier. Il est si beau je tombe instantanément en amour. Inconditionnellement et irrémédiablement. Il est là et va quand même bien compte tenu toutes les souffrances qu'il a surmontées conséquemment à celles vécues par sa maman alors qu'il était encore au chaud dans mon bedon.

Alors que je fais connaissance avc la personne la plus importante de toute ma vie, on vient me chercher pour aller passer des rayons X. Je ne peux même pas savourer mes quinze minutes de bonheur.

Dans l'après-midi, je retourne le voir et c'est la que la foudre s'abat. Le dr nous prévient qu'il vient de passer un scanner du cerveau du capitaine (parce qu'il est maintenant full patch pour s'être battu ainsi) et nous annonce qu'il n'a vraiment pas de bonnes nouvelles pour nous. Le bébé a des hémorragies cérébrales de grade 4 de chaque côté des hémisphères de son cerveau. Le mien arrête d'enregistrer les datas à ce moment; trop d'input en même temps. Je ne comprends pas ce qui se passe. Sûrement un mauvais résidu de morphine dans mon sang. Il nous dit que nous allons avoir un choix à effectuer car le bébé deviendra sûrement neuro-végétatif si on lui permet de vivre. Je m'ouvrirais la tête et transfuserais mes propres cellules afin que le capitaine puisse vivre. Nous retournons à ma chambre et voyons apparaître des flashs lumineux. Il n'y a aucun mot pour dire comment nous nous sentons.

Il n'y a pas de bonne réponse à l'équation. On lui a dit de se battre, qu'on serait toujours là pour lui et maintenant il faut lui ôter la vie. Certains diront, cesser les soins. Je n'aime pas les euphémismes pathétiques. J'imagine mon bébé ouvrir la bouche comme un poisson qui manque d'air. Je pleure toutes les larmes de mon corps et celles de mes 150 prochaines vies. Et je ne suis même pas capable de m'essuyer le derrière toute seule lorsque je vais aux toilettes. Je suis dorénavant un blob incontinent et paralysé par l'amour que je ressens pour ce petit lutin.
Le docteur nous dit de nous dépêcher à prendre une décision car bientôt il sera trop tard puisque Capitaine champion respire déjà presque à 80% par lui-même.

Nous sommes devenus les pestiférés du 5ème étage. Les gens qui nous croisent semblent passer entre la peinture et la tapisserie. Tous sont au courant de ce couple qui a reçu tous les malheurs du monde comme présent. Les gens ne savent pas quoi nous dire, se sentent mal à l'aise et préfèrent nous éviter. L'infirmière nous explique que même si ce n'est pas convenable, c'est normal quand des situations comme la nôtre se produisent.

Après deux jours d'intenses réflexions, nous décidons de ne pas être égoïste et de ne pas faire en sorte que la vie de Julian ne commence jamais en le laissant devenir ce que personne ne voudrait être.

Le médecin m'explique qu'il lui donnera assez de morphine pour qu'il s'endorme et ne souffre pas lorsqu'ils lui retireront son tube d'oxygène. Ce qui arrive en après-midi du 6. Pour la première fois, (et pour la dernière) nous pouvons le prendre dans nos bras et l'accompagner dans la lumière.

J'ai été mère pendant quatre jours; le reste de ma vie ne sera jamais plus pareil. J'avais des doutes à savoir si je voulais un enfant. J'ai reçu l'épreuve ultime. Il a fallu que ceci se produise afin que je sache. Il n'était pas obligé de nous quitter pour me permettre de comprendre.

L'amour ressenti de manière irrémédiable et inconditionnelle. Maintenant je sais.
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MessageSujet: Bonsoir   Le capitaine Pepito, Julian Plana Icon_minitimeMar 9 Déc - 22:19

wow. honnetement je te lève mon chapeau. Merde les docteur ne se sont jamais appercue que avec tout le stock qui t'avait donner sa aurrais pue avoir des dommage sur le bébé? Moi qui m'en fait avec ma perte et que lorsque j'ai accoucher tout c'est bien dérouler, apart que sa fesais mal mais une fois avec l'épidural c'étais merveilleux. Mais je trouve sa tellement triste de passé autant de temps avant de dire bin jpensse qu'on va faire une césarienne. gang de con. Dans ma famille bcq de personne disent que c de la faute au docteur si mon bébé est mort. Mais il ne pouvais pas le savoir puisque tout allait bien, je m'en allait en césarienne quand dans l'ascenseur son petit coeur a flancher. Pis le monde dise : si le doc aurrait fait sa job comme du monde pis qui t'aurrais fait ta césarienne avant le bébé serais encore la.. peut-etre que oui p-t que non. Mais je n'imagine pas la rage que tu devait avaoir pour ses docteur a la noix..
entk je t'envoie une belle penssée pour toi et ton chum je vous souhaite que des beaux jours prochain

isabelle mamange de Jonathan jr.
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MessageSujet: Re: Le capitaine Pepito, Julian Plana   Le capitaine Pepito, Julian Plana Icon_minitimeJeu 11 Déc - 15:14

@ Isabella:

tu sais, la colère est une des grandes phases du deuil; j'y suis restée collée très très longtemps. Mais avec le recul et les recherches que j'ai faites, je me suis aperçue qu'ils devaient avoir fait du mieux qu'ils pouvaient, même si certaines décisions me semblent encore un peu aléatoires.

Si le dr X avait été de garde au lieu du dr Y, est-ce que le dénouement aurait été le même? Qui sait?

Sauf qu'il ne me sert à rien de garder ces émotions; j'ai écrit l'an dernier au directeur des Services professionnels de l'Hôpital Juif et lui ai demandé des explication sur ce qui s'est passé. Je ne voulais pas faire de plainte formelle mais je lui ai écrit que si mon cas parvenait à sauver la vie d'une autre maman et d'un bébé, ma mission serait accomplie.

Un an et trois mois plus tard, ma phase de colère a fini par passer. Dieu merci car elle fut assez rock'n'roll!
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MessageSujet: Je ressens ta colère...   Le capitaine Pepito, Julian Plana Icon_minitimeLun 22 Mar - 15:57

Tu écris un peu comme moi, je crois qu'on se ressemble dans la douleur et dans l'incompréhension...

En te lisant, et toutes les brèches d'humour que tu y mets pour expliquer l'inexplicable et la colère noire qui nous habite... je me reconnais un peu.

Mon anniversaire de naissance est le 20 février, donc mettons que ton histoire m'a frappée par sa récence !!!

Je ne peux que t'envoyer mes pensées les plus positives. Le chemin sera long car ce n'est pas seulement pour ton fils que tu as de la colère mais pour toi aussi.

Je suis dans la période de vie de Shane (8 ans déjà). Et tous les détails de mon propre témoignage, je les revis maintenant, comme si c'était il y a une seconde.

Je te serre fort,

Natchou
xxx
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