Bonjour, je viens de découvrir votre site et de lire la plupart des témoignages de parents endeuillés. Mon histoire, au fond, n'est pas différente des autres et il m'a été impossible de ne pas pleurer devant ces parents qui ont exprimé leur souffrance. Elle est tellement identique à la mienne. Mon histoire remonte à 1990, ce fameux week-rend si terrible où, après une violente dispute avec le père de ma fille (il m'avait menacée d'un couteau), je me suis sentie très mal et j'ai commencé à faire une hémorragie et à avoir des contractions, en début d'après-midi, ce samedi 18 août. Le médecin m'a emmenée lui-même à l'hôpital, mes parents étant en vacances, mon ami au travail et moi toute jeune, à peine 18 ans, je n'avais donc ni permis, ni voiture. Après une échographie et un examen, le gynéco de l'hôpital a décidé de me garder et d'essayer de stopper le travail par perfusion mais il m'avait prévenue que si les contractions ne s'arrêtaient pas durant les prochaines 24 heures, il serait alors impossible d'arrêter le travail et la venue au monde de mon enfant. Ces 24 heures ont été extrêmement douloureuses tant physiquement que moralement. J'avais tellement peur de perdre mon petit enfant et j'avais tellement mal. Le dimanche soir, le gynéco est venu me voir en me disant que compte tenu de la situation, il ne pouvait plus rien faire et que j'allais devoir accoucher. J'ai été emmenée au bloc et à 20H30. Mon enfant est né.... sans vie. Je suis sortie de l'hôpital le 24 août 1990, le jour de mes 18 ans, sans l'avoir vu ni tenu dans mes bras, et avec pour seules compagnies, ma souffrance, ma douleur, de repartir seule, de ne pas avoir ce petit être que j'avais attendu avec tant d'amour et d'impatience, mais aussi avec la tête pleine de questions. Pourquoi moi ? Pourquoi, n'ai-je pas protégé mon enfant ? Est-ce un garçon ou une fille ? qu'est-ce-qui s'est passé ? Avait-il une anomalie ? Je n'ai pas pu l'accompagner dans son dernier voyage car à l'époque, on ne parlait pas d'enfant mais de foetus, à 23 semaines. J'ai gardé pour moi toutes ces interrogations pendant de nombreuses années et lorsque en 1995, j'ai voulu avoir un autre enfant, (avec un autre homme que j'ai épousé en 1996), ma tête, mon inconscient se sont manifestés. J'ai dû attendre 2002, 7 années de larmes, de découragement, de peur et de désespoir pour être à nouveau maman, à 7 mois de grossesse difficile, d'une petite fille, Zoé aujourd'hui, 7 ans. Et encore, et toujours ces questions incessantes. Le temps à passé mais il m'était de plus en plus difficile de ne pas savoir. Je continuais à pleurer mon enfant mais je ne savais pas qui il était. Un garçon ? une fille ? Adrien ou Ophélie (les prénoms que nous avions choisis, son père et moi) ? Je voulais savoir mais j'avais si peur de savoir ce que j'allais apprendre ... L'année dernière, grâce à mon nouvel ami, au mois d'octobre, j'ai fait la démarche de demander mon dossier médical auprès de l'hôpital. En lisant les comptes-rendus, j'ai enfin pu faire connaissance avec mon enfant, ma douce petite fille (il s'agissait donc d'Ophélie !), mais aussi d'apprendre qu'aucune cause médicale n'avait été décelée, qu'elle était en bonne santé. Alors, comment gérer l'ingérable ? comment ne pas se sentir coupable de ne pas avoir été une bonne mère et de ne pas l'avoir protégée, elle, Ophélie si petite et si fragile ? Elle me manque tellement et chaque jour un peu plus. Aujourd'hui, je me bats pour qu'elle soit reconnue officiellement auprès de l'état civil et qu'un livret de famille me soit établi. Malheureusement, toutes les nouvelles lois qui sortent sur le sujet ne sont pas rétroactives et l'on se réfère à une loi qui parlait de foetus et non d'enfant à cette époque-là. Comme si la nature avait subitement plus d'importance aujourd'hui qu'hier, par la seule volonté de l'homme....